01 Sep Le radar sait mieux que quiconque : une nouvelle technologie surveille la santé à distance
Le laboratoire de la lauréate du prix Israël, le professeur Yonina Eldar, a mis au point un moyen de suivre à distance les signes vitaux de plusieurs patients.
Au début de la pandémie de COVID, le professeur Yonina Eldar a lancé un appel inhabituel. Elle a invité les médecins de tout Israël à se joindre à elle en ligne pour une session de brainstorming afin d’identifier les besoins les plus urgents d’un système de santé surchargé. « Au milieu de la crise sanitaire, je me sentais frustrée de rester les bras croisés et de ne pas en faire assez », se souvient-elle.
L’un des problèmes soulevés par les médecins lors de cette session était le risque de propagation de l’infection par contact physique lors de la surveillance des patients hospitalisés. « Ce problème correspondait bien à mes intérêts de recherche », explique le Prof Eldar. « Cela me dérangeait depuis longtemps que le monde de la santé soit à la traîne par rapport à des domaines tels que les communications ou le divertissement en matière d’innovations technologiques. Par exemple, nous pouvons utiliser nos téléphones portables ou jouer à des jeux vidéo sans les mains, mais dans la pratique courante, un médecin utilise toujours un stéthoscope pour examiner un patient, comme il le faisait il y a cent ans. »
Prof. Yomina Eldar
À cette époque, le Prof. Eldar venait de rejoindre le Département d’Informatique et de Mathématiques Appliquées de l’Institut Weizmann des Sciences, où elle a créé un laboratoire qui développe des technologies innovantes pour le traitement des signaux et des informations dans divers domaines, notamment la médecine. Elle a décidé, avec son équipe, de développer une technologie entièrement nouvelle pour surveiller à distance la santé des personnes à l’aide d’un radar.
Les systèmes radar nous sont surtout familiers dans le domaine militaire, où ils servent à détecter des avions ou des navires, mais ils ont également de nombreuses applications civiles, notamment dans l’industrie automobile. Ils détectent et suivent des objets en émettant des ondes électromagnétiques et en interprétant les changements qui se produisent dans ces ondes lorsqu’elles rebondissent après avoir heurté l’objet. Le Prof. Eldar travaille avec les radars depuis le début de sa carrière scientifique, notamment dans le domaine des voitures autonomes et des applications de défense. Elle explique : « Les radars sont petits, peu coûteux et pratiques, et ils émettent des ondes inoffensives pour l’homme. Ils sont utilisés, par exemple, pour compter le nombre de personnes dans une pièce ou s’assurer qu’aucun bébé n’est resté dans une voiture. Je me suis donc dit : pourquoi ne pas utiliser les radars pour surveiller les patients à distance ? »
Cinq ans plus tard, découvrez BRAHMS, le système de surveillance de la santé par bio-radar conçu pour surveiller en continu les signes vitaux d’une personne à distance. Le système permet déjà de mesurer sans contact deux signes vitaux classiques : la fréquence cardiaque ou le pouls et la fréquence respiratoire. Il peut également mesurer la fonction pulmonaire. D’autres paramètres pourraient être ajoutés à l’avenir, notamment la mesure de la pression artérielle et l’analyse du rythme respiratoire, en particulier pour la détection de l’apnée du sommeil.
BRAHMS fonctionne en suivant les mouvements subtils de la poitrine et en les interprétant à l’aide d’un algorithme sophistiqué développé par l’équipe du Prof. Eldar. L’équipe a déjà démontré que son système peut surveiller de manière fiable plusieurs personnes à la fois, même dans des environnements bruyants et bondés. Il identifie toutes les personnes présentes dans la pièce, mesure leurs signes vitaux sans contact et envoie les mesures à un moniteur. Ce moniteur peut alerter le personnel médical s’il détecte un changement pouvant signaler une détresse.
(de gauche à droite) Yonathan Eder, Dr Adi Wegerhoff, Shlomi Savariego, Prof. Yonina Eldar, Oded Cohen, Dr Rui Guo et Luda Nisnevich
Une fois développé pour un usage commercial, un radar BRAHMS compact pourrait être installé dans les salles d’urgence ou les unités de soins intensifs, ou dans tout autre environnement nécessitant une surveillance étroite de la santé de nombreuses personnes simultanément, par exemple dans les unités de soins postopératoires ou les maisons de retraite. Eldar et ses collègues envisagent également d’utiliser les appareils BRAHMS pour surveiller les enfants hospitalisés, qui sont souvent agités et n’aiment pas être reliés à des appareils. Ces appareils sans contact réduiraient non seulement le risque de propagation des infections, mais élimineraient également l’inconfort des patients et les désagréments liés aux fils emmêlés ou arrachés. On estime qu’environ 40 % des patients en soins intensifs souffrent d’irritations cutanées, de fils déconnectés ou d’autres complications liées aux appareils de surveillance placés à leur chevet, ce qui motive encore davantage le passage à la détection radar sans contact.
Selon le Prof. Eldar, son équipe a réussi à créer BRAHMS grâce à une approche d’ingénierie des systèmes, c’est-à-dire qu’elle a intégré une gamme complète d’éléments de conception, allant du développement d’algorithmes avancés à la construction du matériel, de manière à permettre une extraction optimale des données. « Nous avons combiné l’ingénierie, les mathématiques et la physique – jusqu’au niveau des équations physiques qui décrivent le mouvement des ondes et la propagation de l’information – tout en nous fixant comme objectif de résoudre un problème clinique réel, et c’est ce qui a rendu ce développement possible », explique-t-elle.
La Science en Chiffres
Les systèmes radar avancés de type mmWave sont suffisamment sensibles pour détecter un déplacement de quelques millimètres, ce qui est suffisant pour suivre les minuscules mouvements thoraciques d’un nourrisson endormi.
La portée maximale typique du système radar proposé par les chercheurs de Weizmann pour le suivi sans contact des signes vitaux, même à travers les vêtements ou la literie, dans des environnements intérieurs tels que les maisons ou les chambres d’hôpital, est de 9 mètres. La fréquence utilisée par le système est de 77-81 GHz.