
27 Juin Deux missiles iraniens sur le campus de Rehovot
Par Nicolas Panayotis
Deux missiles iraniens ont frappé l’Institut Weizmann le dimanche 15 juin 2025, le cœur battant de la science en Israël. Une cinquantaine de laboratoires ont été détruits, des infrastructures endommagées, des équipements uniques perdus et des décennies de recherches réduites en cendres. Mais ce n’est pas qu’une attaque sur des murs : c’est une attaque sur une idée. Celle que la science peut unir, soigner, éclairer.
Ne soyons pas naïfs. En frappant l’institut Weizmann, le régime des mollahs savait qu’il ferait mal à un centre de recherche d’excellence, un phare du progrès scientifique mondial, et un symbole fort des valeurs d’ouverture, de paix, et de coopération. En ciblant l’Institut, ce régime s’est rendu coupable d’un acte d’une gravité extrême, d’un crime contre l’humanité et les valeurs de toutes les personnes à travers le monde qui soutiennent cette mission de mieux comprendre le monde afin de le réparer.
A l’heure où j’écris ces quelques lignes, les contre-attaques viennent de frapper les installations nucléaires iraniennes à Fordo, Natanz et Ispahan et les spéculations vont bon train. Mais une chose est certaine : dans cette époque d’incertitudes, les chercheurs, eux, savent transformer l’inconnu en connaissance. C’est cette quête de compréhension, ancrée dans la résilience, qui fait du monde scientifique israélien un modèle de courage et de lucidité.
J’ai moi-même eu le privilège d’appartenir à cette communauté. Pendant onze années, l’Institut Weizmann a été ma maison. C’est là, dans le bâtiment Ullmann aujourd’hui ravagé par les flammes, que j’ai commencé à y mener mes recherches, tissé des amitiés indéfectibles et rencontré ma meilleure moitié. Dimanche, c’est le cœur serré que j’ai vu ce bâtiment et d’autres défigurés, sur les images envoyées par des amis ou circulant sur les réseaux sociaux. Au milieu de cette désolation, une autre image m’est apparue : celle de notre fils Yuri jouant à la crèche WIZO (elle aussi relativement endommagée par l’attaque), pendant que sa mère et moi travaillions à construire un monde meilleur dans nos laboratoires.
Si je me livre personnellement sur le Weizmann, c’est parce qu’il n’est pas un simple centre de recherche. Il n’est pas juste l’endroit où l’on va travailler. Le Weizmann est un lieu de vie, il accueille en son sein des hommes et des femmes de tous les horizons, toutes les religions, animés par la volonté de faire croitre les connaissances, traiter les maladies, préserver notre environnement, innover et créer les technologies de demain pour le bien de toute l’humanité. Si c’est un lieu, c’est aussi surtout une mentalité, celle de se permettre de poser des questions originales pour répondre à des problèmes complexes tout en étant guidé par la curiosité.
Cette mentalité ne peut pas être ciblée par des missiles et le Weizmann avec l’aide et la solidarité de ses membres et de sa communauté à l’échelle internationale saura j’en suis sûr, rebâtir, réparer et se régénérer pour donner naissance à une version encore meilleure de l’Institut et avec lui, la promesse d’un avenir plus lumineux que nous continuerons, ensemble, à défendre.
Nicolas Panayotis
Nicolas Panayotis est neurobiologiste moléculaire. Il est aujourd’hui chercheur au Saints-Pères Paris Institute for the Neurosciences (SPPIN), Chef d’équipe « Biologie Moléculaire du Transport Neuronal » (CNRS, Université Paris Cité). Nicolas Panayotis a étudié la neurobiologie et le comportement à l’université d’Aix-Marseille et a obtenu un doctorat en génétique médicale au Centre de génétique médicale de Marseille (Inserm-MMG), sous la direction du Dr Jean-Christophe Roux. Il y a étudié le modèle murin déficient en MeCP2 pour le syndrome de Rett, une maladie génétique neurodéveloppementale dévastatrice. Il a rejoint le groupe du professeur Mike Fainzilber à l’Institut Weizmann des Sciences, à Rehovot, en Israël, pour son post-doctorat puis un Senior Internship de 2012 à 2023. Son objectif était de déchiffrer les rôles de la famille des facteurs de transport nucléaire importine dans le comportement des souris et les voies neuronales ; ses recherches ont mis en lumière le rôle de l’importine α5 dans la régulation de l’anxiété via le contrôle du transport nucléaire de MeCP2 et d’autres importines et facteurs de transcription dans la douleur et la mémoire.