La fraîcheur de l’ombre : comment de la glace peut exister près de la surface lunaire

Des micro-pièges froids près des pôles de la lune pourraient contenir de l’eau gelée accessible

Si les humains établissent un jour des installations sur la lune, ils devront le faire près de l’un de ses pôles où de petites quantités d’eau sont stockées sous forme de glace. Cette glace a été détectée dans des zones difficiles d’accès : au pied de grand cratères profonds, où la lumière ne pénètre pas et les températures restent en-dessous de -160°C. Mais une nouvelle étude menée par des chercheurs américains et des chercheurs de l’Institut Weizmann des Sciences suggère qu’au moins une partie de l’eau gelée de la lune pourrait être piégée dans des endroits plus accessibles – au sein de dépressions plus petites avec des pentes plus douces que celle des cratères.


Images obtenues par la caméra à angle étroit de la sonde Lunar Reconnaissance Orbiter près du pôle nord. Largeur d’environ 9,3 kilomètres. Le soleil est sur la gauche à moins d’un degré au-dessus de l’horizon. Crédit : NASA/GSFC/ASU

L’idée émise en 1961 que de la glace existerait au niveau des pôles lunaires, a depuis été confirmée par des sondes et instruments russes, américains, chinois, japonais et indiens. Bien qu’il n’y ait pas d’atmosphère et que les températures en journée soient assez chaudes pour faire bouillir de l’eau, l’empêchant de s’accumuler en surface, l’intérieur des cratères des régions polaires est dans une ombre glaciale en permanence. La glace des comètes et d’autres sources s’y accumule et y reste pour une éternité.

Mais autour de ces grands cratères, il existe de plus petits trous et de plus petites bosses créés par l’impact de météorites et, dans le paysage en noir et blanc de la lune, de petites dépressions restent parfois dans l’ombre en permanence. Les trois chercheurs ayant mené cette étude – le professeur Paul Hayne de l’Université du Colorado, Boulder, le docteur Norbert Schörghoferat de l’Institut de planétologie d’Honolulu, Hawaï, et le professeur Oded Aharonson du Département Sciences de la Terre et Planétologie de l’Institut Weizmann des Sciences – ont émis l’hypothèse, sur la base de cartes et de mesures récentes de la lune, qu’ils pourraient déterminer si ces petites dépressions peuvent être assez froides pour piéger et stocker de la glace.

Le professeur Oded Aharonson

L’équipe a utilisé les données venant d’instruments de la sonde Lunar Reconnaissance Orbiter de la NASA qui cartographie la surface de la lune à haute résolution depuis plus de dix ans. L’une des nombreuses caméras de la sonde, la caméra à angle étroit – liée à un puissant télescope – donne des images en gros plan de la surface accidentée des pôles de la lune. Un deuxième instrument appelé DLRE est un radiomètre infrarouge qui apporte des mesures de température et un troisième, LOLA, est un altimètre laser qui fournit des informations topographiques.

« Chacun d’entre-nous a utilisé différentes parties des données pour créer différentes parties du modèle avant de les assembler toutes ensemble, » dit le professeur Aharonson. La première étape a été de déchiffrer, à partir des images en deux dimensions, combien de trous et de creux sont présents dans ces régions, quelle est leur profondeur et quelles zones de ces dépressions sont constamment dans l’ombre.

Ces creux sombres sont-ils assez froids pour contenir de la glace ? Le DLRE a pu donner la température moyenne des zones mais n’est pas assez précis pour donner celles des petits sites au fond des creux. Les chercheurs ont pu cependant, avec un peu de travail, calculer quelle quantité de chaleur pouvait affecter ces dépressions, qu’elle provienne des roches chaudes environnantes ou du peu de lumière réfléchie sur leur rebord.

Les résultats de leurs calculs suggèrent que même des dépressions de moins d’un mètre de largeur pourraient être des « micro-pièges froids » qui retiendraient de petites quantités d’eau glacée. Si de la glace est effectivement découverte dans les faibles dépressions près des pôles, l’analyser permettrait d’en déterminer la source dans notre système solaire.

« D’après nos modèles, ceci ne serait qu’une fraction de toute la glace présente sur la lune mais plutôt que de descendre dans de profonds cratères inhospitaliers, les gens devraient être capables d’avoir assez d’eau pour subvenir à leurs besoins dans ces petits réservoirs de glace plus proches et hospitaliers , » dit le professeur Aharonson.

Les recherches du professeur Oded Aharonson sont financées par le Centre Minerva pour la Vie dans des Conditions Planétaires Extrêmes.



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